Depuis la révélation d’un possible trésor enfoui sous le centre-ville pendant la Seconde Guerre mondiale, les Lorientais s’interrogent : que se passe-t-il réellement lorsqu’un particulier découvre un trésor sur son terrain ou dans sa maison ?
Entre droit civil, patrimoine national et intérêt historique, la législation française encadre strictement ce type de découverte.
Une découverte fortuite qui obéit à des règles précises
Dans l’affaire évoquée à Lorient, un passionné d’histoire, Jean Guilbert, a mis au jour dans les archives municipales des documents datant de 1944. Ces papiers mentionneraient une cache de « bons du trésor » ou de valeurs transférées par les autorités allemandes dans les derniers mois de l’Occupation.
Si la piste s’avère réelle, la découverte pourrait se situer sous les fondations d’un bâtiment civil de l’avenue du Faouëdic. C’est de là que provient le nom du «Trésor du Faouëdic».
Mais avant d’imaginer le partage d’un butin, la loi impose un cadre très précis.
Selon l’article 716 du Code civil, un trésor se définit comme un bien caché ou enfoui dont personne ne peut prouver la propriété. Le texte stipule que :
« Le trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre terrain. S’il est découvert dans le terrain d’autrui, il appartient pour moitié au propriétaire du sol et pour moitié à celui qui l’a trouvé. »
Autrement dit, si le trésor de Lorient existait vraiment et se trouvait sous une maison appartenant à un particulier, le propriétaire des lieux et le découvreur se partageraient la découverte à parts égales.
Un encadrement strict pour protéger le patrimoine
La loi ne se limite toutefois pas à un simple partage. Dès qu’une découverte présente un intérêt historique, artistique ou archéologique, le Code du patrimoine entre en jeu.
L’article L531-14 précise qu’une découverte fortuite doit être signalée immédiatement à la mairie ou à la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC), en Bretagne pour ce cas précis, la DRAC Bretagne.
Cette déclaration permet à l’État de vérifier si le bien trouvé doit être classé comme élément patrimonial.
Dans ce cas, la propriété du trésor peut être attribuée à l’État, mais le découvreur conserve un droit à indemnisation calculé en fonction de la valeur estimée.
Une procédure d’expertise est alors engagée : datation, vérification de l’origine des objets, analyses scientifiques et examen de leur contexte historique.
Quand l’histoire rejoint le droit
Plusieurs précédents existent en France. En 2012, des ouvriers avaient découvert des lingots d’or dans une maison de Normandie ; en 2019, un trésor numismatique avait été retrouvé dans une cave en Dordogne.
Dans ces cas, les services de l’État étaient intervenus pour assurer la conservation et vérifier la légalité de la possession.
Les découvreurs n’avaient pas pu vendre librement leurs trouvailles, celles-ci ayant été classées au titre du patrimoine national.
À Lorient, le cas serait comparable. Les documents évoqués par Jean Guilbert datent de la Seconde Guerre mondiale et pourraient appartenir à l’histoire du territoire plus qu’à un intérêt privé.
La Ville de Lorient et la DRAC Bretagne seraient donc en première ligne pour encadrer les recherches et décider du statut du trésor, en fonction de sa valeur historique et de son emplacement exact.
Déclaration obligatoire et sanctions possibles
La législation française est claire : toute découverte de trésor non déclarée constitue une infraction.
La dissimulation ou la tentative de revente sans signalement officiel peut être assimilée à du recel de patrimoine, puni par le Code pénal.
Les autorités locales rappellent qu’en cas de découverte, il faut laisser le bien en place et prévenir immédiatement la mairie ou la gendarmerie, qui transmettent ensuite à la DRAC.
Un notaire lorientais confirme :
« Il ne faut surtout pas déplacer un objet découvert. Le premier réflexe doit être administratif, pas financier. C’est ce qui protège le découvreur en cas de litige. »
Un enjeu patrimonial plus qu’un trésor d’or
Entre le droit de propriété et la protection du patrimoine, la France a choisi depuis longtemps la voie de la préservation.
Ainsi, à Lorient comme ailleurs, les trésors du passé appartiennent d’abord à la mémoire collective avant d’appartenir à quiconque.

